Ma copine m’a dit : « vendredi, mets des chaussures de sport, je t’emmène à Bora Bora ! »
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Bon, ce n’était pas Bora Bora, elle m’a menti. C’était le bout du bout du monde, on s’est glissées dans une faille temporo-spatiale, ce fut fantastique.
En fait, le bout du bout du monde, pour tout dire, le paradis, ça se mérite.
Pour y accéder et en repartir, il faut utiliser la corde. J’ai les pec(s) en loque aujourd’hui.
Mais avant, nous avons pris un tout petit chemin qui longeait la falaise. Puis il a fallu descendre petit à petit. Elle m’avait prévenue : « au bout du chemin, il y a une corde pour accéder à la plage. Cette corde, on la vole régulièrement. On la remplace régulièrement. »
Elle m’avait dit aussi : « dépêchons-nous, la marée est basse et le coefficient est faible. Je t’emmène à la cabane. »
A la cabane ?
Nous sommes arrivées sur cette plage complètement déserte, immense mais déserte. Nous avons marché, marché sur le sable en direction de la cabane que nous avons failli rater.
Incroyable, cette cabane. Au pied de la falaise, un amas de bois flottés qui s’enchevêtrent. Blanche, la cabane, lumineuse. Avec une entrée et deux terrasses. Nous avons installé nos affaires sur l’une d’elles, en plein soleil. Et ma copine s’est mise en maillot de bain et est allée se baigner !
Euuuuh, copine, tu n’es pas bien dans ta tête ? L’eau est à 11°C ! Moi, je n’ai pas pu y aller, je n’avais que mon maillot de bain spécial bronzage, ce n’était donc pas possible.
Je l’ai suivie malgré tout pour l’encourager. J’ai retiré mes chaussures, mes chaussettes et j’ai trempé les pieds au bord, tout au bord, là, où les vaguelettes venaient s’éteindre sur le sable chaud. Au premier abord, l’eau était délicieuse, puis aussitôt une barre saisit mes chevilles et les scia. J’ai vraiment cru perdre mes pieds, là, sur cette plage fantastique.
Pendant ce temps-là, ma copine barbotait, se roulait dans les vagues, nageait, on aurait dit une sirène.
Puis nous sommes remontées nous installer sur la terrasse. J’ai sorti mon thermos de café et deux gobelets. Il fallait au moins un peu de café pour qu’elle se réchauffe.
Elle m’a raconté l’histoire de la cabane. C’est Ludo qui la construit peu à peu. Il ramasse tout ce qu’il trouve sur la plage : le bois flotté, des tongs, des fleurs en plastique, des gourdes et bien d’autres choses. Qu’il accumule dans la cabane, sur des étagères.
Oh bah tiens, le voilà justement. Là-bas, les pieds dans l’eau, en short, le sac à dos dans le dos, avançant, tirant une énorme branche puis remontant la plage de galets.
Ludo, c’est le facteur Cheval, local. Il est un peu plus jeune que nous. Il a commencé cette aventure en 2019. Il s’amuse, il s’éclate. La cabane est à tout le monde dit-il. Mais un truc l’énerve tout de même c’est qu’il ne supporte pas que des gens viennent choisir leur bois sur sa cabane. Il a raison !
Je ne sais pas s’il est facteur, je ne sais pas ce qu’il fait dans la vie mais j’adore, j’adore les gens peu communs.
J’ai voulu lui proposer un peu de café en lui disant : auriez-vous un verre parce que je n’ai que deux verres ?!
Il me répond : ah mais dans la cabane, il y a un verre, j’en ai trouvé un sur la plage !
Il n’a pas voulu de café, il a mangé son goûter et il est reparti.
Ma copine me dit : et c’est même pas un baba cool !
Je lui réponds : ah mais il l’a peut-être été, j’ai vu la trace d’un trou de boucle d’oreille sur son lobe.
Elle s’est fichue de moi !
Je lui dis : toi, tu fais des études de cas en lisant des comptes rendus d’enquête, moi, je fais mes études in vivo !
On a parlé cheveux, poils qu’on a, qu’on n’a plus, produits naturels, diy et lumière pulsée. Elle ne connaissait pas ce terme lumière pulsée !
On a fait le tour des copines. Est-ce qu’on a cassé du sucre sur elles ? Très peu ! Row, faut bien qu’on s’amuse un peu !
Il a fallu repartir, reprendre la corde, remonter tout le chemin, j’ai cru que j’allais cracher tous mes poumons ; là, je me suis dit que d’avoir choisi ce jour-là pour jeûner était une connerie !
Là-haut, il y avait les chevaux. En contre-jour.
Je suis rentrée chez moi, j’ai regardé l’heure, une fois dans mon garage : 19h47 !
Row, et le couvre-feu ?! Et les masques ? Le Covid ?
J’avais tout oublié.
