Pour faire suite au texte sur le CDD et le manque d’état d’âme de certains employeurs dans le service public :
- Bon, alors, il y avait une mouche, je vous l’ai mise sur le bord de la fenêtre. Elle n’a pas l’air d’aller bien, je vais lui mettre un peu d’eau avec du sucre, il faut qu’elle se requinque.
- Euuuuuh ! Je vous paie pour faire le ménage pas pour nourrir les mouches !
Ou :
- Bon, alors, je vous ai arrosé vos plantes !
- Euuuuh ! Laissez-moi arroser mes plantes, c’est mon moment de détente. Je vous paie pour faire le ménage pas pour nourrir les plantes !
En vrai, je ne lui parle pas comme ça !
Elle est comme ça, T, ma femme de ménage. Elle m’énerve parfois parce qu’elle n’est pas toujours attentive à ce qu’elle fait, elle n’est pas très soigneuse, je retrouve des choses en équilibre, des objets fragiles tout au bord des étagères, prêts à tomber : je pense qu’elle met des pièges pour voir si moi, je suis attentive.
Et elle parle beaucoup sans se demander si j’écoute ou pas. Quand elle parle, elle ne peut pas travailler en même temps.
En revanche, elle fait bien le ménage. Après tout, c’est ce que je lui demande. Et elle est gentille.
En janvier, quand Jak était de nouveau hospitalisé, quand je devais terminer mon recueil de nouvelles, elle n’a pas pu venir car l’école l’a appelée pour venir chercher sa fille ; il y avait un cas Covid dans sa classe. Donc pas de ménage possible pour le week-end. Egoïstement, ça m’a profondément énervée.
J’ai donc rajouté le ménage à mon planning. Et là, j’ai constaté des tas de choses déconnantes : il manquait des éléments à l’aspirateur, des coins négligés et poussiéreux enfin bref.
J’ai tout noté sur un cahier, j’étais très énervée et je n’ai pas été très sympa dans mes notes.
En fait, je fais appel à une société de nettoyage. Cette société fait le lien entre la femme de ménage et moi. J’ai choisi cette formule qui est bien plus chère que celle qui est d’employer quelqu’un en CESU. J’ai choisi ça pour être tranquille : je ne suis pas contente de la femme de ménage, paf, je change ! On m’en propose une autre !!
En fait, ce n’est pas si simple.
La société gère les absences, je ne paie que les prestations.
De T. et de ses remplaçantes quand elle ne peut pas venir. Elle a été absente tout le mois d’août pour maladie, j’ai eu des remplaçantes.
La société me demande régulièrement si tout va bien. Je ne réponds jamais.
Sauf, après ce week-end. J’ai appelé pour faire le point. Pour savoir ce que les femmes de ménage avaient le droit de faire ou pas. Pour voir comment ils fonctionnaient avec les femmes de ménage.
Je leur ai dit que j’avais constaté des choses abîmées mais que ce n’était pas forcément du fait de T. puisqu’il y a eu plusieurs remplaçantes.
Tout de suite, on m’a dit : vous voulez changer ? On vous trouvera quelqu’un pour février.
Je n’ai pas répondu.
J’ai insisté cependant pour dire que ce n’était pas forcément T. qui avait abîmé le matériel. Je pensais que les responsables de la société feraient peut-être une mise au point avec les femmes de ménage. Je leur ai dit que je rapporterai notre discussion à T à sa prochaine prestation.
- Ah mais vous avez raison, évidemment. M’a-t-on répondu de façon outrée, d’un air « oui, il faut communiquer, dialoguer »
Le vendredi, j’ai discuté avec T. Non, les responsables ne lui ont rien dit du coup de fil que j’avais passé. Rien.
Qu’est-ce qui devait se passer pour elle en février ? La société allait lui retirer les heures qu’elle faisait chez moi, sans aucune explication et sans lui donner une autre prestation. En fait, ça se passe comme ça.
Elle a senti le vent tourner, elle s’est inscrite dans une société d’aide à la personne.
Une femme de ménage employée par un organisme ne travaille jamais à plein temps. Ici, elle est payée au SMIC avec les congés payés. Elle n’a pas 1000€ par mois. Je crois qu’elle tourne autour de 800€. Quand elle est allée chercher sa fille à l’école bah c’est de l’argent qu’elle n’a pas gagné. Quand je pars en vacances et que du coup, elle ne vient pas travailler, c’est de l’argent qu’elle ne gagne pas.
J’ai rappelé la société de nettoyage pour leur dire que je gardais T. Et dorénavant, je discute avec T. Je ne lui ai pas fait lire le cahier de liaison où j’ai passé ma mauvaise humeur (valait mieux pas), j’ai choisi de communiquer, de dire les choses le plus soft possible. Parce que si je ne dis rien, elle ne pourra jamais deviner ce que je veux vraiment ; c’est la seule chance que l’on ait pour arranger les choses.
Communiquer. Ah mais c’est du boulot de communiquer.